Annexe de la ville voisine de Thionville (Moselle), le village de Guentrange se tapit au pied d’un coteau à quelques kilomètres de la Moselle. Comme la plupart des communes sises au flanc des Côtes de Moselle, ce village a longtemps vécu au rythme de la vigne depuis les III-IVe siècles après J .C.
Blason du village de Guentrange
D’abord, propriétés des seigneurs locaux (Comte de Luxembourg, Seigneur de Lagrange…) et de grandes abbayes, les vignes de Guentrange ont attiré les investissements de la bourgeoisie thionvilloise au cours du Moyen Age. En 1468, le Duc de Bourgogne, Charles le Téméraire afferme les deux pressoirs qu’il possède dans cette commune à plusieurs bourgeois et vignerons de Thionville contre le versement annuel d’une redevance. Ce qui en dit long sur le contrôle que ceux-ci exercent sur le vignoble local.
Jusqu’à la Révolution Française, le village vit au rythme des récoltes, abritant une communauté rurale prospère. Les grands pressoirs à bascule hérités de la civilisation gallo-romaine étaient, non seulement les outils principaux de la communauté villageoise lors des vendanges, mais aussi le symbole d’une exploitation communautaire de la vigne.
Au XVIIIe siècle, la plus faible rentabilité des vignes a poussé la bourgeoisie à abandonner progressivement le vignoble au profit des vignerons locaux. Les évènements de la Révolution Française ont accéléré ce mouvement. Au début du XIXe siècle, le vignoble Guentrangeois couvre plus de 105 hectares et produit en moyenne 4000 hl d’un vin rouge de qualité correcte et d’un vin blanc à la réputation moins flatteuse. Mais, la division du vignoble en de nombreuses propriétés d’exploitants beaucoup plus individualistes est déjà à la base du problème récurent de la qualité des vins mosellans. C’est à cette époque que l’utilisation des grands pressoirs à bascule entre en désuétude au profit des petits pressoirs circulaires. Cette mutation technique est fortement significative du passage d’une exploitation communautaire du vignoble à une exploitation individualiste.
L’essor de l’industrie (qui attirait de plus en plus de main d’œuvre au détriment de l’agriculture) et des transports (les vins de meilleurs qualités et de moindre prix du Sud de La France commencèrent à arriver en Lorraine) ont provoqué le déclin du vignoble mosellan dès le milieu du XIXe siècle. L’annexion du département par l’Allemagne ne fit que retarder l’échéance. Dès les années 20, les surfaces exploitées en vigne et les productions de vins mosellans s’effondrèrent et laissèrent la place aux vergers dans la première moitié du XXe siècle, avant que les versants ne se voient envahis par les constructions résidentielles.
Dans ce cadre, la découverte d’un pressoir à bascule dans les locaux de la ferme du Marienthal (à l’est du village) a permis aux nostalgiques du vignoble guentrangeois de faire renaître une parcelle du patrimoine agricole et culturel du village. Restauré, ce mastodonte de 6 tonnes est actuellement exposé près de l’Auberge du Crêve-Cœur
