Au Chili

merci à Françoise Picot

Valparaiso

Valparaiso (le Val du Paradis), ville de 285 000 habitants bâtie sur les flancs de 42 collines (cerros), est la première ville fondée par les Espagnols à leur arrivée au Chili. C’est depuis toujours le port de Santiago. En pleine expansion jusqu’au percement du canal de Panama, Valparaiso, principale étape des navigateurs qui doublaient le Cap Horn accueillait au XIX ème siècle les baleiniers qui chassaient dans le Pacifique Sud. C’est de Valparaiso que partait une partie du salpêtre destiné à l’Amérique du Nord. Les bateaux partaient chargés de salpêtre et revenaient avec du pin d’Oregon et des tôles qui servaient à la construction des maisons. C’est aussi à Valparaiso, dans sa maison La Sebastiana que Pablo Neruda a écrit nombre de ses poèmes.

Une des particularités de Valparaiso est sans nul doute ses ascenseurs (los ascensores) qui grimpent dans les collines. Ce sont plutôt des funiculaires, wagonnets en tôles ou en bois peints qui tirés par des câbles d’acier, escaladent des pentes très raides. Vingt-cinq ascenseurs ont été construits entre 1883 et 1915. Il en reste actuellement une quinzaine dont dix, inscrits au patrimoine mondial de l’humanité, fonctionnent encore. Ils appartenaient autrefois à des compagnies privées qui les cèdent ou les ont pour la plupart cédés à la ville.

Ils portent le plus souvent le nom de leur colline : Villaseca, Artilleria, Cordillera, San Agustin, El Peral, Concepcion, Reina Victoria, Espiritu Santo, Florida, Mariposa, Las Monjas, Baron, Lecheros, Larrain, Polanco.

On y accède pour quelques pesos (un peu plus pour monter que pour descendre) par d’antiques tourniquets en fonte. Les machineries à l’exemple de celle de « Le Baron » sont impressionnantes.

 

 

La mine de cuivre El Teniente et le campement minier de Sewell

Le Chili est le plus grand producteur (environ 5millions de tonnes par an) et exportateur de cuivre au monde (40% du cuivre de la planète). Il possède environ 38% des réserves mondiales de minerai de ce métal. L’exploitation du cuivre représente plus de 40% de l’économie du pays et presque 10% de son PIB.

Les 2/3 de la production est réalisée par des sociétés privées, le reste l’est par une entreprise d’Etat : CODELCO (Corporatión Nacional delCobre de Chile).

Sur la carte ci-dessous - photo 1 - (musée de Sewell) : localisation des mines privées (disques verts), les mines exploitées par CODELCO (disques rouges), les villes (carré bleus)

CODELCO

Placée sous la tutelle du ministère des Mines, CODELCO est le 1er producteur mondial de cuivre. La production de l’entreprise est réalisée par quatre divisions, dans le nord et le centre du Chili. La division « Norte » comporte la plus grande mine à ciel ouvert du monde avec Chuquicamata. La division «El Teniente » est la 2 ème en importance. Avec l’ensemble de ses divisions, CODELCO concentre 33 % de la production totale minière du Chili. 

EL TENIENTE

La mine El Teniente, près de Rancagua au Chili, est la mine souterraine la plus grande au monde. Elle est située à 2500 mètres d’altitude au cœur de la Cordillière des Andes dans la VIème région du Chili. Elle produit environ 400 000 tonnes de cuivre annuellement ainsi que 5200 tonnes de molybdène. En 1971, Salvador Alliende a nationalisé les mines de cuivre, la mine El Teniente est alors passé aux mains de l’Etat. L’entreprise CODELCO exploite ce site depuis 1976. Il y a dans l’exploitation du cuivre de El Teniente  trois grandes étapes qui se déroulent dans différentes zones de la montagne Cerro Negro :

- l’extraction dans 2400 kilomètres de galeries souterraines dans la montagne. On extrait environ 35 millions de tonnes de minerai à 1,15% de teneur en cuivre. Le minerai est acheminé vers l’usine de concentration par chemin de fer.

- la concentration à Colón y Sewell - La roche est envoyée dans des broyeurs qui vont réduire la roche en gravier puis avec de l'eau la transformer en une pâte plus facile à travailler. La pâte est ensuite mélangée à des réactifs chimiques dans des cellules de flottaisons. Après épaississement, filtrage et séchage on obtient un concentré à 30% de cuivre, du molybdène et de l’acide sulfurique.

- la fusion à la fonderie à Caletones dont on aperçoit une des cheminées sur la photo - Le cuivre est fondu dans des fours et affiné pour obtenir suivant la demande des clients soit des plaques faites d’un cuivre très pur (99% de teneur en cuivre) soit des lingots crantés. Le cuivre est aussi exporté sous forme liquide dans de longs cuivroducs. L’entreprise porte une grande attention au retraitement des déchets. Autrefois déposés sur le site même dans des lacs aujourd’hui asséchés, ils sont désormais expédiés par des canaux de déjection dans le parc à résidus Carén, situé à 90 kilomètres de la mine.

4500 personnes travaillent à El Teniente dont 2000 en permanence. Les ouvriers habitent Runcagua ou sa région (à une soixantaine de kilomètres) et ont un rythme de travail basé sur 4 jours à la mine, trois jours de repos.

 

 

 

LE CAMPEMENT MINIER DE SEWELL

Le gisement de cuivre de El Teniente est exploité depuis longtemps. On peut encore apercevoir les traces d’un ancien campement à côté de la fonderie actuelle.L’exploitation de la mine El Teniente fut concédée par le gouvernement chilien au Nord Américain William Braden en 1905. Cette date marque la fondation de la grande industrie cuprifère au Chili. Il fit construire rapidement une usine de concentration du minerai, des routes, une voie ferrée qui assurait la liaison avec Runcagua et une ville pour loger toute l’année les ouvriers. Le campement de Sewell du nom du premier directeur de la Braden Company est le seul à avoir été destiné à un habitat permanent. Il est le reflet de l’essor de la production de cuivre rendue possible au début du XXème siècle par les nouvelles technologies de fonderie et par l’investissement considérable de capitaux américains. Cette ville car ce fut une véritable ville (elle s’étendait sur 175000m 2 et en 1968 15000 personnes y vivaient) est construite sur les pentes abruptes de la montagne autour d’un grand escalier qui part de la gare ferroviaire. La circulation à l’intérieur de la ville est essentiellement piétonnière. Des escaliers secondaires relient les niveaux différents, des allées courent sur les pentes abruptes et débouchent sur des places. Les édifices sont en bois recouverts d’enduits et peints de couleurs vives, les toits sont en tôles. La ville comprenait des bâtiments résidentiels, des bâtiments publics et des bâtiments miniers. L’ensemble était hiérarchisé : on y retrouvait des maisons de catégories différentes les unes destinées au personnel dirigeant essentiellement nord-américain (elles ont disparu), d’autres pour le personnel d’encadrement (ce sont essentiellement ces bâtiments de catégorie B qui subsistent) et les dernières pour les ouvriers. Les bâtiments publics étaient nombreux : hôpital, club, école, théâtre, église, bowling. Certains sont encore visibles. La première usine de concentration était dans le campement même ; elle a fonctionné jusqu’à cette année 2006 et possède encore tous ses moulins ; elle doit être transformée en musée. A Sewell, les ouvriers embauchés pour leur petite taille et leurs mains calleuses étaient chiliens, les cadres nord-américains. Une opposition dans les mentalités existait entre les travailleurs chiliens, essentiellement ruraux au départ et les cadres nord- américains. Le bowling était un des rares lieux où se cotoyaient les différentes catégories sociales.

 

Vivre et travailler à Sewell impliquaient d’observer des règles strictes ; on lit dans un fascicule édité par le ministère chilien de l’éducation et l’entreprise CODELCO ceci : A Sewell, l’alcool était interdit, le concubinage également, tous les couples doivent être mariés officiellement. Vivre à Sewell, c’était appartenir à un tout organique et faire partie d’une communauté qui renforçait sa cohésion par les fréquentes relations familiales des ses membres, par les conflits du travail et les accidents qui coûtèrent la vie à de nombreux travailleurs.

Périodiquement des tragédies ont frappé la communauté d’El Teniente : accidents de chemin de fer, éboulements, avalanches, accidents du travail. Mais la pire fut celle connue sous le nom de « tragédie de la fumée » le 19 juin 1945 : les fumées d’un incendie qui s’était produit à l’entrée de la mine envahirent les galeries et 355 travailleurs périrent asphyxiés. La ville a prospéré jusqu’à son abandon à partir de 1970 où peu à peu on a transféré les mineurs vers Rancaragua. La démolition du campement a alors commencé. De 1980 à 1988, seuls les mineurs célibataires y étaient logés. A la fin de 1998, le site fut l’objet d’un plan de décontamination à cause de la pollution aérienne due à la fonderie et complètement évacué ; il fut ensuite déclaré monument national et un plan fut établi pour sa conservation : 18 bâtiments ont été restaurés extérieurement et un musée de la cuivrerie a été installé dans l’ancienne école industrielle d’inspiration moderniste. La ville minière de Sewell est inscrite depuis juillet 2006 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO .

Le site officiel de Sewell
La partie "mémoire" du site de la Codelco
Le centre d'information du cuivre, laitons et alliages
La fiche compléte sur le site de l'UNESCO